Des Saint-Agnanais nouveaux ont rejoint ce village du Tarn qui fait revivre en le rénovant l’habitat rural.
La route fleurie
Le nom de Saint-Agnan qui provient de San Anianus, évêque d’Orléans mort en 452, figure dans les registres consulaires dès 1250.
Jusqu’au XIIIe siècle, la seigneurie de Saint-Agnan était aux mains de la famille des Saisset, alliée aux comtes de Toulouse. Le nom des Saisset est entré dans l’histoire grâce à un prélat, le fougueux Bernard Saisset, évêque de Pamiers, qui, pour avoir été partisan des thèses théocratiques du pape Boniface VII s’était opposé au roi de France, Philippe le Bel, qui le fit arrêter pour trahison, pour finalement l’exiler.
En 1789, la cure de Saint-Agnan fut inféodée à celle de Garrigues puis rétablie en septembre 1850 à celle de Lavaur. L’église date d’ailleurs du XIXe siècle avec un clocher octogonal dont la flèche a été endommagée par la foudre en 1991 puis reconstruite.
Le château d’Enjaux
Le bâtiment le plus célèbre de Saint-Agnan n’est cependant pas son église mais le château d’Enjaux qui figure dans la correspondance de cette infatigable épistolière que fut la marquise de Sévigné. Ce château a abrité Radio-Toulouse, le poste privé le plus puissant de France avant d’être détruit par un commando de l’armée allemande le 20 août 1944.
L’histoire de Radio-Toulouse mérite d’être contée. Elle correspond à l’esprit d’une époque où la radio constituait un élément important de la vie sociale. En 1925, Radio-Toulouse émettait depuis les collines de Toulouse, jusqu’à ce qu’un incendie détruise les installations en 1933. La reconstruction d’une installation plus moderne de radiodiffusion, d’une puissance accrue de 60 kw, fut réalisée sur le domaine d’Enjaux à Saint-Agnan au milieu d’un terrain de 70 hectares. L’antenne était constituée de deux pylônes haubanés de 120 mètres de hauteur, situés de part et d’autre du château, à 220 mètres l’un de l’autre. Pour assurer le refroidissement des lampes, un bassin de 400 m3 était prévu. Une ligne de 27 kilomètres fut construite pour alimenter en énergie électrique un poste de sectionnement caché au fond de la vallée par un bosquet d’arbres, à plusieurs centaines de mètres du château. De là, deux câbles souterrains envoyaient directement le courant de 13 500 volts à la salle d’émission.
Les riches heures de Radio-Toulouse, Alain Gillmann les rappelle dans un article de « La Dépêche du Midi » : «Tous les orchestres en renom, les chorales, les diverses sociétés musicales de la région ont pris au moins une fois la route de Saint-Agnan pour se produire souvent en public, toujours en direct sur l’antenne, soit dans le parc à la belle saison, soit dans les studios. Des retransmissions de soirées au théâtre du Capitole apportent l’opéra et l’opérette jusque dans les coins les plus reculés de nos campagnes. Il en va de même pour l’information nationale ou régionale. L’unique café du village, aujourd’hui disparu, était le rendez-vous de tous ces touristes des ondes, qui, leur visite terminée, espéraient encore voir, entre deux émissions, une de leurs idoles ».
La vedette s’appelait Jean Roy, speaker depuis les tout-premiers jours de la station. Sa popularité était immense. C’était le temps des postes à galène ou des récepteurs à lampe. Mais les voisins les plus proches du château n’avaient qu’à prendre le frais, l’été, devant leur porte pour que la musique arrive jusqu’à eux.
Pendant l’Occupation, l’émission la plus populaire qui s’appelait le « disque des auditeurs » fut supprimée, les autorités allemandes soupçonnant là un moyen pratique de communication entre résistants.
À la Libération, les militaires allemands qui occupaient le château l’incendièrent et firent sauter les deux pylônes.
Aujourd’hui, Saint-Agnan s’est construit un art du bien vivre. Il retrouve grâce à son cadre, à sa situation géographique proche des deux pôles urbains que sont Lavaur, à 7 km, et Toulouse à 30 km, les attraits qui avaient suscité l’implantation de Radio Toulouse.